Les
blessures à la cheville sont très communes pendant les activités sportives; 85%
des traumas sont des entorses en inversion! Les récidives sont tout aussi
fréquentes et 40% des gens reste avec de l’instabilité (Safran 1999).
L’intérêt
des bilans isocinétiques dans cette situation clinique prend ainsi tout son
sens puisque plusieurs études (Tropp 1986, Konradsen et al. 1998 et Kaminski
2003 entres autres) démontrent qu’un déséquilibre du ratio agoniste-antagoniste
(éverseurs/inverseurs) ainsi que la vitesse de contraction des éverseurs sont
des facteurs de risque considérable pour les récidives d’entorse à la cheville.
On
comprend donc que de documenter ces paramètres améliorent grandement nos
interventions cliniques. Mais est-ce que l’entraînement isocinétique permet une
plus value lorsqu’une cheville demeure instable même suite aux traitements
conventionnels?
C’est
la question que se sont posée Ufuk Sekir et ses collègues dans l’étude
ci-contre où ils comparent les paramètres isocinétiques sur les 2 chevilles de
24 hommes athlètes récréatifs ayant une instabilité fonctionnelle unilatérale
de cheville. 11 des 24 participants avaient une atteinte du membre inférieur
dominant et les 13 autres du côté non dominant (veuillez noter que selon
l’étude de Munn J. et al (2002), il n’y a pas de différence significative au
niveau de la force de cheville du côté dominant ou non dominant chez une
personne n’ayant pas eu de blessure à ce niveau). L’âge moyen des participants
était de 21 ans et ils devaient avoir eu au moins 2 entorses modérées à une
même cheville pour pouvoir intégrer l'étude.
La
proprioception fut évaluée de 2 façons :
· Un
mouvement passif précis de la cheville produit par l'appareil d'isocinétisme
qui devait être reproduit par le sujet qui avait les yeux bandés
· Équilibre
unipodal debout sur une surface cousinée (medium-density polyfoam), yeux
fermés, 1 minute
Les habiletés fonctionnelles furent évaluées par 5
différents tests : single limb hopping course (SLHC), one legged (OLHD)
and triple legged hop for distance (TLHD), six meter (SMHT) and cross six meter
hop for time (CSMHT).
La
force fut évaluée à l’aide des paramètres isocinétiques suivant : la force
maximale des inverseurs et éverseurs de la cheville en concentriques et
excentriques à 120 degrés/seconde.
Les
déficits que présentait la cheville instable par rapport à la cheville saine
étaient :
· Diminution
de force concentrique des inverseurs
· Diminution
importante de la proprioception en inversion (position de la cheville dans
l’espace)
· Diminution
significative du résultat d’équilibre unipodal de la cheville atteinte
· Le
temps d’exécution pour les trois tests fonctionnels (SLHC, SMHT, CSMHT) était
tous plus lent et la distance dans le OLHD était moins loin avant l’intervention
clinique.
Les
participants ont effectué un programme d’exercice isocinétique 3x/semaine pour
une période de 6 semaines pour leur cheville instable.
Résultat/conclusion :
Le
programme utilisé a eu un effet positif sur les paramètres de force, fonction
et proprioception de la cheville.
· Amélioration
de la force maximale seulement en concentrique des inverseurs
· Amélioration
de la proprioception; capacité de reproduire plus précisément le positionnement
de la cheville dans l’espace en inversion à 10 et 20 degrés et une amélioration
du test d’équilibre unipodal
· Performance
fonctionnel : il n’y a pas eu de changement pour la cheville saine, mais une
amélioration des paramètres des 5 tests pour la cheville instable.
Réflexion :
Cette
étude démontre bien le déficit de force musculaire d’une cheville instable par
rapport à la cheville opposée chez un même sujet. Il aurait été intéressant de
voir l’amélioration suite à un travail de renforcement sur 12 semaines. Par
contre, il est tout de même intéressant de voir que simplement avec un travail
isocinétique on peut avoir une progression au niveau de la proprioception et de
certains aspects de performance chez un athlète qui ne pouvait être à son
meilleur avec une cheville instable. Ainsi, on peut réduire le risque de
récidives d’entorse et redonner à l’athlète la chance que sa cheville instable redevienne
aussi performante que l’autre (ou du moins presque). D’un côté clinique,
l’évaluation isocinétique ainsi que le traitement prennent tout son sens pour
détecter ce qui est vraiment à cibler pour chacun de nos patients dans une
rééducation de cheville afin de diminuer l'instabilité résiduelle et diminuer
les risques de récidive. Est-ce que le muscle en question a un déficit en
force? En vitesse? À quel angle? Ce sont des questions auxquelles l’analyse sur
appareil isocinétique peut répondre.
Résumé
écrit par Myriam Gagnon-Beaudoin, TRP collaboratrice pour le C.E.I.
Source :
Sekir Ufuk et al., Effect of isokinetic training on strength,
functionality and proprioception in athletes with functional ankle instability.
Knee Surg Sports Traumatol Arthrosc (2007) 15:654–664. DOI
10.1007/s00167-006-0108-8. PubMed PMID : 16770637. http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/16770637
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